Jacqueline Burckhardt

Jacqueline Burckhardt, 1990
© Jan Jedlicka

Jacqueline Burckhardt

« Nous étions à la recherche d’artistes et d’auteurs dont les intérêts et les questionnements nous semblaient importants, nous faisions confiance aux conseils de personnes compétentes et nous tissions peu à peu notre réseau. Parce qu’il voulait jeter un pont entre les deux rives de l’Atlantique, Parkett paraissait en édition bilingue allemand-anglais. Nous avions un bureau à Zurich et un autre à New York et nous travaillions toujours directement avec les artistes. »

« J’entrevoyais un modèle d’académie qui s’inspirait du Jardin d’Académos où, dans l’Athènes antique, les philosophes dialoguaient en flânant. C’est pourquoi nous avons une fois organisé notre académie au jardin botanique de Berne. »

Jacqueline Burckhardt, 2022
© Bice Curiger

Jacqueline Burckhardt est dotée de multiples talents : elle est tout à la fois restauratrice, historienne de l’art, commissaire d’exposition, auteure, éditrice et organi­satrice. Sa passion pour l’art la pousse à réunir dans son existence tous ces domaines d’activité. Ce qui la guide, c’est une authentique curiosité et une réelle af­finité avec l’art. Les expériences acquises au cours de sa formation de restauratrice à l’Istituto Centrale del Restauro de Rome lui ont donné l’assise sur laquelle se base son approche de l’art, une approche fondée en premier lieu sur l’appréhension immédiate, la vo­lonté de se mettre au service de l’oeuvre d’art et la conscience de l’interpénétration de la théorie et de la pratique. Des études d’histoire de l’art à l’Université de Zurich lui ont permis d’enrichir ce sens de l’unité vécue des connaissances théoriques et de l’expérience esthétique en le complétant par la vision analytique de cette discipline.

Jacqueline Burckhardt est cofondatrice et rédactrice de la revue d’art Parkett. Pendant 33 ans, de 1984 à 2017, elle a fortement contribué à dessiner la physionomie de cette publication. À chaque fois, Parkett plaçait l’art actuel au centre de la discussion, en mettant l’accent sur les transferts d’influences et les relations entre ar­tistes d’un côté à l’autre de l’Atlantique, thèmes que la revue traitait sous une forme bilingue, allemand-an­glais. Cette démarche rencontra un succès éclatant, notamment grâce à la proximité avec les artistes qui la caractérisait. Les 101 cahiers publiés pourraient au­jourd’hui être considérés comme une histoire de l’art de leur temps. Parkett a permis à plus de 300 artistes d’aller au-devant du public. Les énumérer reviendrait à lire la table des matières de cette histoire de l’art. Une lecture qui irait de Richard Artschwager à Laura Owens, de Tauba Auerbach à Robert Wilson, de Cosimavon Bonin à Jimmie Durham, de Maurizio Cattelan à Sylvie Fleury, de Fischli/Weiss à Katharina Fritsch. Dans ces pages, les stars comme Meret Oppenheim, Andy Warhol, Roni Horn, Paul McCarthy, Isa Genzken, Richard Serra et Monica Bonvicini côtoient les nar­rateurs comme Sam Taylor-Wood, Mika Rottenberg, Karen Kilimnik et Sophie Calle, les interprètes du monde comme Alighiero e Boetti, Camille Henrot et Pipilotti Rist et les poètes comme Luc Tuymans et Tacita Dean. Puristes, narrateurs, démiurges ou in­terprètes du monde, tous ces artistes se caractérisent par une esthétique spécifique, celle de l’économie des moyens, et une conscience particulièrement dévelop­pée du mode d’apparition de l’oeuvre d’art.

Parallèlement à ses activités de médiation d’art dans Parkett, Jacqueline Burckhardt a lancé au Kunsthaus de Zurich un programme de performances, donnant ainsi à Laurie Anderson l’occasion de gagner les fa­veurs d’un public zurichois fidèle. Dix années durant, elle a été à la tête de la Sommerakademie du Zentrum Paul Klee de Berne, qui, sous sa direction, s’est éta­blie dans le monde artistique et est devenue un forum important pour les débats sur l’art actuel. Jacqueline Burckhardt a aussi enseigné les fondements de l’art aux futurs architectes de l’Accademia di architettura de Mendrisio. Elle a élaboré avec différents artistes un programme pictural complexe pour le Campus Novar­tis de Bâle (2005–2015), par lequel le site déploie toute une narration de la recherche et de l’histoire de l’indus­trie pharmaceutique. Jacqueline Burckhardt a présidé différentes institutions, telles que la Fondation Nestlépour l’Art ou, de 1998 à 2006, la Commission fédérale d’art, donnant ainsi des impulsions importantes à la politique culturelle suisse. Pour mener à bien son projet de nouveaux vitraux pour le Grossmünster de Zurich, l’artiste allemand Sigmar Polke a souhaité que Jacqueline Burckhardt soit l’experte accompagnant son processus artistique. Sur le plan programma­tique, on pourrait qualifier Jacqueline Burckhardt de metteuse en scène de la médiation d’art vivifiée, pour paraphraser le titre de sa thèse de doctorat, Giulio Romano, Regisseur einer verlebendigten Antike (Giulio Romano, metteur en scène d’une Antiquité vivifiée).

Jacqueline Burckhardt, née à Bâle en 1947, est restauratrice et a étudié l’histoire de l’art à l’Université de Zurich. En 1984, elle a co-fondé la revue d’art Parkett. Elle vit à Zurich.