Sibylle Berg est née à Weimar. Son œuvre comprend de nombreux romans, essais, pièces de théâtre et pièces radiophoniques et a été traduite en 34 langues. Elle a notamment reçu le Prix Wolfgang Koeppen, le Prix de l'œuvre dramatique Else Lasker-Schüler et le Prix littéraire de Cassel pour l’humour grotesque. Elle vit et travaille à Zurich.
L’œuvre de Sibylle Berg n’est pas un séismographe. Sa langue est elle-même un tremblement de terre. Il ne reste ensuite plus que les décombres laissés par l’histoire. Les débris et les cendres d’un monde auquel rien de mieux ne peut arriver que sa fin. Et alors les catastrophes naturelles ordinaires n’étonnent plus personne.
Avec plus d’une vingtaine de pièces de théâtre, 14 romans et d’autres productions diverses, cette œuvre se dresse comme un monolithe dans le paysage littéraire suisse. Un centre de réflexion qui observe depuis des décennies le monde où nous vivons.
Sibylle Berg a développé une langue qui dit sans détour ce qui reste dans les ruines. Les peurs spécifiques de l’être humain y sont toujours envisagées avec la pleine conscience que c’est l’homme qui détruit le monde ; et en dépit de leur actualité, ce qui impressionne tant dans les personnages de Sibylle Berg est leur côté archaïque.
Ces textes sont peuplés de marginaux, d’hermaphrodites, d’homos, d’hétéros et de jeunes qui tombent amoureux pour la première fois – tous ne cherchent que le bonheur et sont pourtant de tristes figures. Malgré tout et même dans les situations les plus désespérées, la voix unique de Sibylle Berg laisse transparaître des touches d’humour.
Même si les protagonistes, des femmes également, sont souvent abandonnés à eux-mêmes – ils ne sont pas là pour être montrés du doigt. Il s’agit plutôt de comprendre ce que le néolibéralisme et la technologie font de l’homme, cet être imprévisible et sentimental. Et dans ce but, Sibylle Berg en appelle à la science, à des expertes de l’intelligence artificielle, des spécialistes de la violence, des biologistes marines.
Sibylle Berg se préoccupe vraiment du sort des gens. Dans le monde réel ou dans ce qu’on appelle le monde extérieur, comme elle le dit dans le titre d’une de ses pièces, elle ne se contente pas de faire part de ses idées, elle s’engage aussi activement contre l’État de surveillance tout en appelant à constituer « le plus beau de tous les groupes: la démocratie » – « afin que la peur des individus devienne le courage des masses ».
Le roman GRM de Sibylle Berg s’achève par une idylle : des enfants bourrés de talents, dont l’existence misérable s’exprime au mieux dans des beats bruts, sont unis dans une rude tendresse pour affronter l’avenir.
Nous nous réjouissons de découvrir les prochaines œuvres de Sibylle Berg et nous la félicitons pour ce Grand Prix suisse de littérature. Et nous espérons que le prochain millénaire ne commencera pas aussi misérablement – et ne sera pas notre dernier.